Le régiment des dromadaires en Egypte

En arrivant en Egypte le général Bonaparte débarque avec 30 000 hommes, dont quelque 3 000 cavaliers en comptant réquisitionner sur place les excellents chevaux arabes nécessaires, aussi le grand commandement n’avait-il accepté d’embarquer que les montures des officiers et de l’Etat-major. Mais à l’arrivée les chevaux escomptés sont en trop petit nombre dont la plupart fatigués, voire malades.

Par décret du 20 nivôse an VII (19 janvier 1799) Bonaparte crée un régiment de dromadaires composé de 389 hommes en deux escadrons de 4 compagnies chacun.
Les hommes seront montés sur des dromadaires, armés de fusil, baïonnette, giberne, ainsi que d’une longue lance, et seront habillés de gris avec turban et manteau arabe. Les chefs de brigades devront remettre à l’état-major un modèle de harnachement et d’uniforme le 25 nivôse au plus tard.

Les effectifs seront puisés dans 13 demi-brigades, 2 brigades légères et les guides à pied qui fourniront chacune 10 ou 15 hommes selon les cas. Ils auront tous au moins 24 ans et 4 ans de service et mesurer au moins 5 pieds et 4 pouces (le système métrique allait apparaître quelques années plus tard). D’une bravoure reconnue ils sont aussitôt envoyés, pour leur formation, au Caire dans la caserne de la place Ezbekyeh qui leur est affectée.
Des chevaux avaient été réquisitionnés mais leur morphologie ne convenait pas aux selles apportées et ils étaient trop faibles pour porter de lourdes charges.

photo : soldat.jpg

L’infanterie montée sur des dromadaires va redonner l’avantage aux soldats français et Bonaparte demandera à Kléber de créer 6 autres régiments sur le même modèle et cette cavalerie d’un nouveau genre va s’avérer très efficace, le Général Desaix ayant un rôle décisif.
Lorsque plus tard ces régiments vont venir à manquer de presque tout Kléber parviendra pourtant à les maintenir en ordre de combat mais les Anglais reprennent l’avantage et le régiment sera finalement dissous. Les 283 soldats survivants seront versés dans la Gendarmerie nationale par arrêté des Consuls du 18 fructidor an 9 (5 septembre 1801)

Dans ce régiment de dromadaires on a compté 4 Ardéchois :

LACROIX André né le 19 mars 1772 à Privas, taille 9 pieds 2 pouces, brigadier à la 18ème demi-brigade en ligne, incorporé le 20 nivôse An VII au 9ème bataillon de l’Ardèche, matricule 334

TALLAUR Antoine né le 11 mars 1774 à Rompon, taille 9 pieds 4 pouces, cavalier à la 19ème demi-brigade en ligne, incorporé le 30 nivôse An VII au Régiment de l’Ardèche, matricule 233

VINARD Pierre né le 26 avril 1779 à Charmes, taille 9 pieds 4 pouces, soldat à la 19ème demi-brigade en ligne, incorporé le 30 nivôse An VII au Régiment de l’Ardèche, matricule 234

THOUET Jean né le 18 mars 1779 à Ardoix, taille 9 pieds 1 pouce, cavalier à la 18ème demi-brigade en ligne, incorporé le 30 nivôse An VII, matricule 395 (on peut en déduire qu’il n’a pas fait partie du recrutement initial)

Les premiers de ces méharistes ont été recrutés le jour-même de la création du régiment et lors de sa dissolution, en germinal An X, ils ont tous été versés dans les Gendarmes à pied de l’Ardèche. Plus tard ce régiment a servi de modèle à toutes les puissances coloniales en Afrique.


Ordre 290, décision de Bonaparte

Quartier général du Caire, 20 nivôse An VII

Article premier : il sera créé un régiment de dromadaires qui sera composé de deux escadrons, chaque escadron de quatre compagnies, chaque compagnie d’un capitaine, un lieutenant un maréchal-des-logis chef, deux maréchaux-des-logis, un brigadier-fourrier, quatre brigadiers, un trompette et cinquante dromadaires

Article deux : chaque escadron sera commandé par un chef d’escadron ; le régiment par un chef de brigade avec un adjudant-major, un quartier-maître et les chefs d’ouvriers nécessaires.

Article trois : les hommes seront montés sur un dromadaire, armés de fusil, baïonnette, giberne, comme l’infanterie et d’une très longue lance. Ils seront habillés de gris avec un turban et un manteau arabe conformément au modèle qui sera fait

Article quatre : l’ordonnateur en chef, les chefs de brigade BESSIERES, DÉTRES, DUVIVIER se concerteront pour faire confectionner un modèle de harnachement et d’habillement complet qui sera remis à l’état-major général le 25 nivôse au plus tard

Le général en chef ordonne que les 13ème, 18ème, 25ème, 32ème, 69ème, 75èmedemi-brigades de ligne, la 21ème légère et les guides à pied fourniront chacun 15 hommes ; les 9ème, 19ème, 61ème, 85ème, 88ème demi-brigades de ligne, les 4ème et 22ème légères fourniront chacune 10 hommes pour le fonds de la formation du régiment des dromadaires

                                                                                          Signé BONAPARTE

Voilà des soldats non préparés qui vont s’adapter à leurs nouvelles montures et enchaîner les succès, mais l’oublions pas les officiers qui ont dû proposer pour le 25 nivôse un modèle d’uniforme pour un régiment créé le 20 ! La tenue de parade a peut-être été dessinée plus tard.

photo : Tenue_de_parade.jpg

(ayons aussi une pensée pour les petites mains qui ont taillé et cousu les 389 costumes)

Et parmi eux nous avons la fierté de compter ces 4 Ardéchois. Si l’un d’eux figure parmi vos ancêtres nous seront très heureux de le mentionner ici.

Daniel Ferradou