Il faut notter que la contagion estant eschauffée à Joyeuse ladicte année mil six cens vingt neuf
la plupart de ses habitants sortirent de la ville le vingt deuxiesme
du mois d’aoust et nous cessâmes et de baptiser à l’église et d’enterrer
au cimetière jusque que nous fusmes retirer ce qui estoit resté
de vivant, la contagion en ayant emporté troys cens cinquante
ou cinquante cinq personnes petitz et grands, au nombre desquels se
firent plusieurs femmes enceintes. Que Dieu appelle dès maintenant
leur enfant par une deslivrance et pour aucune l’enfant dans leur
ventre. Il faut notter qu’il y heust un misérable regain(?)
en ce qu’on treuva bon de mettre quelques soldats pour se prendre
garde de la ville et en lieu de ce, les gardes mirent la peste
aux quatre coins et furent cause de la mort de plusieurs
et même de la leur, pour ce qu’ils pensoient seulement à prendre
et furent prins. Dieu aye pitié d’eulz et de tous les aultres et
nous veuille garder de tel fléau à l’advenir, nous faisant la grâce
de vivre en Sa crainte.

Signalé par G. LHOPITAL
 
NDLR : Il s’agit ici, non plus de la peste de Marseille de 1720 mais de celle qui sévit cent ans plus tôt, en 1629 et 1630. Ses ravages furent cruels en Ardèche, mais les chiffres exacts sont mal connus. Ici nous avons la chance de trouver un chiffre assez précis donné par un contemporain et, de plus, par une personne digne de foi en ce qui concerne des chiffres qu’il devait mieux connaître que quiconque. On peut estimer la population de Joyeuse, à cette époque, à 750 personnes environ. C’est donc pratiquement la moitié de la population qui fut emportée par la maladie. Ne manquez pas de nous signaler de tels chiffres quand vous les rencontrez.

Ce texte est également un bel exercice de paléographie. Notre traduction vous satisfait-elle ? Avez-vous mieux à nous proposer ?